En remontant le temps…
Dans le Fonds de la Prévôté de Saint-Ursanne, il est fait mention d’un pré dit “Goldmatten”, appartenant au chapitre de Saint-Ursanne “entre la fin et fenaige de Courtaon et de Perouse”, “finit sur laigue et riviere” qu’est appelée le Largin. Le toponyme doit désigner la Largue. (source: archives de l’ancien Evêché de Bâle, Damien Bregnard, archiviste)
En parcourant les alentours de cette clairière, le pied du visiteur heurtera partout de vieilles pierres couvertes de mousse, seuls témoins des fermes qui tenaient compagnie au Largin. (source: André Dubail)
Un permis de construire en 1850

Deux autres autorisations en 1857


En 1842, Batz, Bonfol fausse monnaie au Largin

On propose à Guillaume Bourgnon d’accepter une fausse pièce de monnaie. Le préfet du district de Porrentruy – Joseph Choffat – a été averti que de fausses pièces circulent dans la région et découvre un trafic de petits faussaires à Bonfol. Aux maisonnettes du Largin – ni vu ni connu – de faux monnayeurs français refilent des contrefaçons. Il appartient à la justice française de démasquer les faussaires – tous français – et c’est le procureur à Altkirch, qui annonce une quinzaine plus tard que les auteurs de ce trafic sont poursuivis.
Et plus tard en 1874
son fils Sylvain construit une grange et une écurie

Tous les chemins d’Ajoie

Et tous les chemins du Sundgau

menaient au Largin
Aujourd’hui les buissons ont gommé la plupart de ces chemins qui dessinaient une étoile autour de ce lieu qui englobait sept maisons (source: Mélanie Thalmann)
On y venait à cheval, à pied ou en calèche

Jeunes et vieux – parfois mille personnes en fin de semaine – s’y retrouvaient pour s’amuser, y boire un coup, y déguster une friture de carpes, y mesurer leurs forces dans une bagarre et aussi faire un brin de contrebande.
et même en train
puisqu’il y avait une gare à Pfetterhouse





C’est Ferdinand Bourgnon qui vend ses biens à Henri Mathieu en 1905 (Source: Registre foncier, Canton et République du Jura)

En haut: Le petit Largin, dit “Hitzahäfla”. La frontière passe entre les deux maisons. On devine le four à pain international (à gauche l’Allemagne et à droite la Suisse). Et l’épicerie: on venait y acheter du tabac, de l’alcool, du sucre, du café, du chocolat…et bien sûr du pain qui avait passé trois fois la frontière: pétri et enfourné en Suisse, cuit en Alsace, rapatrié en Suisse pour être vendu aux Alsaciens. Un commerce qui fleurait bon la contrebande. (Source André Dubail. Photo: amitié sans frontière).
Le téléphone en 1903 au Largin
Dans la collection des annuaires téléphoniques:
1903 – 1905 sous Bonfol: Bourgnon Ferdinand, Le Largin
1906-1909 sous Bonfol: Mathieu Henri, auberge, Le Largin
Après 1909, il n’y a plus d’inscription pour Le Largin
(Source: Archives PTT, collection des annuaires téléphoniques)


En 1909
Modeste Mamie, de Bonfol, est le propriétaire du Largin (Source: Registre foncier, Canton et République du Jura)
On a planté un sapin dans les années 1910

Début août 1914
Les loupiotes se sont éteintes, les flonflons ont laissé la place à des bruits de bottes.
Le monde entre en feu et en sang pour plus de quatre années
Le Largin est occupé par l’armée suisse, Léon Gelin en est l’exploitant

1931 Aimé Mamie est propriétaire du Largin

mais c’est Oscar et Claire Falbriard qui gèrent temporairement le café-restaurant et l’épicerie, suite à la crise horlogère de 1930 (source Evelyne Bassand-Falbriard)
En 1934 la Banque cantonale de Berne acquiert le Largin
et c’est la famille Thalmann – originaire du canton de Lucerne – qui s’installe et en devient propriétaire le 31 décembre 1934. (Source: Registre foncier, République et canton du Jura)

Mélanie Thalmann, 96 ans
a passé son enfance et sa jeunesse au Largin. Elle raconte: Le bâtiment n’ayant pas d’électricité, on s’éclairait à la lampe à pétrole. Pas d’eau courante non plus, on pompe l’eau dans un puits à la cave ou on va en puiser dans la rivière, la Largue. Je me rendais à l’école du village – Bonfol – à bicyclette, ou parfois à pied, il y avait six kilomètres.
La famille gère l’épicerie et le restaurant. La vie a repris son cours, mais plus aussi intensément qu’avant la guerre.
Ce sont les Bohémiens de Seppois qui animent le bal du lundi de Pâques
ou celui du lundi de Pentecôte, deux bals très prisés
L’auberge cesse ses activités officiellement en 1939, l’épicerie reste cependant en place! Après la guerre 1939-1945, l’épicerie péréclite aussi, les gens devaient traverser la fontière en passant désormais par la douane, située loin du Largin.
En 1952
la famille Thalmann vend le domaine du Largin à la famille Haefele, venue du canton de Bâle.
Jusqu’à l’arrivée de cette dernière, pendant deux ans, Frédéric Kobel, et son épouse Ida et leurs cinq enfants en bas âge exploitent la Largin, toujours sans eau courante, ni électricité, encore moins de téléphone. Il faudra attendre la fin des années 1960 lorsque la DAT de Bienne, installera une ligne téléphonique.
Et le sapin a grandi

Dans un sommeil profond
comme abandonné Le Largin n’est plus qu’un souvenir pour certains et plus grand’chose pour d’autres
Jusqu’à sa renaissance avec le KM0 en 2012, ses commémorations et en 2018
la famille Zbinden de Beurnevésin et le fils Jérôme – nouveau propriétaire – sont sensibles à l’histoire et au patrimoine de ce coin de pays. La maison d’habitation a été sauvée de la pelle destructrice, hangars et écuries reconstruits à neuf, ce qui redonnera toute la splendeur à cette clairière si chargée d’histoire.
